De Paris à Casablanca, en stop et en logeant chaque soir chez l’habitant : pari tenu ! 2 630 kilomètres parcourus en 10 jours et grâce à 34 voitures, dont 1 camionnette, 1 camion et 1 camping-car ; d’innombrables rencontres, de profondes et passionnantes discussions, une grande et belle complicité avec la plupart de nos conducteurs ; mais aussi de nombreuses heures d’attente au bord de la route ou dans les stations-service - notre spécialité à présent, des sandwiches à gogo mangés sur le pouce entre 2 voitures et une petite mésaventure à mi-chemin… C’est parti pour le récit de l’aventure qui a démarré notre voyage en beauté ! Une aventure marquée par la présence du Seigneur à nos côtés tout au long de cet incroyable périple…
Samedi 23 avril, 15h26. Etienne m’attrape la main et m’entraîne vers la sortie des Missions Etrangères de Paris, où le Père François a célébré notre messe d’envoi (les MEP étant l’un de nos sponsors par le biais de la Bourse de l’Aventure Chrétienne que nous avons remportée en juin 2015, nous avons choisi de partir depuis leur chapelle). Ça y est, le grand départ est arrivé. Après un déjeuner partagé avec nos familles et nos amis, nous nous élançons vers cette aventure que nous préparons depuis si longtemps. Je ne suis pas sûre de réaliser que ces nombreux proches qui nous saluent à coup de drapeaux, nous ne les reverrons pas avant 1 an… et que je m’apprête à vivre le plus grand de mes rêves !
Nous marchons jusqu’à la Porte d’Orléans, où nous voulons attraper une voiture pour sortir de Paris. Une question nous hante : où dormirons-nous ce soir ? A Lyon, à Orléans ou dans une station-service aux portes de Paris ? En 30 secondes à peine, nous trouvons une voiture et atterrissons 3 heures et 3 conducteurs plus tard à Auxerre, où nous passons la nuit à l’évêché, en compagnie de religieuses pétillantes et après avoir profité d’un délicieux repas de fête - un début prometteur et un petit clin d’œil de la Providence : Sœur Lourdumary, Sœur Francisca et Sœur Jeya, d’origine indienne, nous rappellent nos amies Missionnaires de la Charité de Paris et le fondateur de leur ordre était un prêtre des Missions Etrangères de Paris !
KTO TV était présent lors de notre départ : découvrez ici le reportage (à partir de la minute 12:04).
Dimanche 24 avril. Le lendemain, nous avons du mal à avancer : nous faisons des sauts de puces du centre d’Auxerre à l’entrée de l’autoroute, puis de station-service en station-service… Jusqu’à ce qu’Aïcha et Lahcen nous prennent pour nous emmener à Perpignan ! Ces 2 Français originaires du Maroc débordent de joie, d’enthousiasme et de générosité, et nous donnent un bel avant-goût de l’hospitalité marocaine en nous invitant chez eux pour la nuit ! Au fil de nos discussions sur le Maroc et sur nos religions, c’est une belle amitié qui est en train de se tisser…
Lundi 25 avril. Aujourd’hui, nous devons rejoindre Barcelone, où des amis espagnols nous attendent. Nous y parvenons grâce à un homme d’affaires français, qui nous prend en pitié alors que nous sommes coincés sur une aire d’autoroute déserte…
A Barcelone, nous passons une soirée reposante grâce à Blanca, Maria et Itziar, qui nous reçoivent comme des rois ! Nouveau signe de la Providence que nous découvrons avant d’aller nous coucher : nous recevons un message de Laetitia, qui a entendu parler de notre projet grâce à Facebook et propose de nous héberger à Valence ! Cela tombe bien, nous comptions justement y être le lendemain !
Mardi 26 avril. Ce matin, nous passons voir les Missionnaires de la Charité présentes à Barcelone avant de reprendre la route. Sœur Blanca, que nous avions rencontrée à Paris, est ravie de nous revoir et partage avec nous un moment de prière. Son sourire et le gâteau qu’elle nous offre « pour nous féliciter de notre mariage » nous donnent des forces pour la journée ! Miguel puis Cristina nous mènent à destination : Valence, que nous visitons un peu avant de rejoindre Laetitia.
Mercredi 27 avril. Aujourd’hui, nous avons un objectif ambitieux : rejoindre Malaga, pour espérer être au Maroc demain soir. Il faut croire que la Providence en avait décidé autrement… C’est en effet aujourd’hui que nous aurons la plus grosse frayeur, mais aussi la plus belle surprise, de notre voyage jusqu’à Casablanca !
Après avoir marché deux bonnes heures dans Valence pour rejoindre l’autoroute puis enchaîné les voitures, nous montons dans la voiture d’Angel, un Espagnol adorable qui possède 3 restaurants basques à Benidorm, une station balnéaire près de laquelle nous sommes passés. Je profite de la voiture spacieuse pour sortir mon appareil photo et immortaliser ce stop fort sympathique… et oublie ce cher appareil sur la banquette arrière ! Nous nous en rendons malheureusement compte une fois sortis de la voiture… Après une brève crise de larmes, nous décidons de revenir sur nos pas pour aller chercher l’appareil photo à Benidorm. Nous sommes épuisés par cette journée, souffrons tous 2 d’un mal de tête et avons peu déjeuné, mais heureusement, nous possédons les informations nécessaires pour retrouver Angel. S’ensuit alors la séance de stop la plus dangereuse que nous ayons connue jusque-là : sous un soleil de plomb et juste après une barrière de péage, pile à l’endroit où les voitures accélèrent pour rejoindre l’autoroute… et avec pour menace l’arrivée de la police, qui n’aime pas voir des auto-stoppeurs à cet emplacement ! Heureusement, Pablo nous emmène jusqu’à Benidorm, où nous partons à la recherche des 3 restaurants basques d’Angel. Cette véritable chasse au trésor prend fin grâce à Antonio, qui confirme travailler pour Angel et appelle ce dernier sur-le-champ pour le prévenir de notre présence.
La journée s’achève autour d’un Coca bien frais partagé avec Immaculada, la mère d’Angel, qui nous offre une nuit à l’hôtel et nous invite à dîner dans le restaurant de son fils : « il est trop tard pour que vous repreniez la route et vous avez besoin de vous reposer ! » dit-elle… Grâce à Angel et Immaculada, nous avons retrouvé notre appareil photo et surtout pu profiter d’un repos bien mérité. Comme nous le dira plus tard un conducteur, « cet oubli, c’est le Seigneur qui voulait vous offrir une pause à un moment où vous deviez en avoir besoin ! ». En effet, ce jour-là, je ne faisais que me plaindre de nos sacs à dos trop lourd… Décidément, nous ne sommes pas seuls sur les pas de Mère Teresa !
Jeudi 28 avril. Après un bon petit-déjeuner, nous reprenons la route avec un objectif ambitieux : Malaga. Tout le monde nous dit que c’est beaucoup trop loin mais nous y croyons ! Et c’est grâce à une petite dizaine de conducteurs que nous atteignons notre destination, après avoir traversé des paysages désertiques, presque lunaires, et rencontré Nicolas, un Français de passage en Espagne qui nous marque par sa grande générosité : « vous consacrez une année pour les autres, je peux bien faire un détour de 30 minutes pour vous ! ». Avec Nicolas, qui est évangélique, nous échangeons sur notre foi et sur la Providence, qui est décidément bel et bien à nos côtés lors de cet incroyable périple…
Vendredi 29 avril. Ce matin au réveil, l’excitation est à son comble : aujourd’hui, nous devrions poser le pied sur le sol marocain ! Pour Etienne, c’est la première sortie hors d’Europe ! Nous atteignons Algeciras grâce à plusieurs conducteurs, dont un camion et un camping-car – et, pour la première fois depuis le début, quelqu’un nous demande de nous emmener : le stop s’inverse ! A 18h, nous arrivons officiellement au Maroc !
Nous passons la soirée à Tanger avec Kebe, un Sénégalais qui nous accueille pour la nuit et que nous avons rencontré grâce à Couchsurfing. Kebe nous présente ses amis français et marocains, qui travaillent pour la plupart auprès des handicapés ou des migrants. Une nouvelle fois, nos échanges sont très riches ! Certains connaissent même les Missionnaires de la Charité de Tanger, qui s’occupent essentiellement des enfants des rues vivants dans une grande précarité affective et matérielle.
Petite anecdote : au Maroc, le 9 avril est une date très importante… non pas pour notre mariage mais parce que le 9 avril 1947, le roi Mohammed V prononça un discours où il demanda l’indépendance du Maroc ; indépendance que le pays acquit en 1955.
Samedi 30 avril. Ce matin, nous passons voir les Missionnaires de la Charité présentes à Tanger. Nous partageons un moment d’Adoration avec elles, avant de partir en direction de l’autoroute vers Rabat. C’est la première fois que nous faisons du stop au Maroc, et je dois dire que je ne suis pas très rassurée… La mère supérieure des Missionnaires de la Charité de Tanger nous a vivement déconseillé le stop ici, affirmant que les Marocains ne savent rien faire gratuitement et qu’il n’est pas bon être chrétien au Maroc en ce moment… Est-ce un signe qu’il faut renoncer au défi que nous nous sommes fixés et nous tourner vers le bus ou le train ? Sans compter toutes ces personnes qui se sont montrées surprises et récitantes quand nous avons évoqué notre projet de faire du stop au Maroc… Etienne profite de mon hésitation pour m’emmener vers l’autoroute, et heureusement, car le stop au Maroc est ce qu’il y a de plus facile : en 3 voitures et quelques heures, nous voilà arrivés devant la cathédrale Saint-Pierre à Rabat ! Avec encore une fois à la clé de superbes rencontres, dont un père de famille qui nous confie : « vous arriverez toujours à suivre votre chemin car c’est pour aider les autres que vous marchez ! ». Nous avons bien fait d’ignorer les rumeurs !
Le soir, nous logeons chez une famille d’expatriés français que nous avons rencontrés à la messe : nous n’avions pas d’hébergement pour la nuit et Claire, Nicolas, Marc, Agnès, Julie et Pierre nous ont simplement ouvert les portes de leur maison et de leur superbe famille ! Ensemble, nous échangeons tels de vieux amis sur le Maroc, la France et la vie d’expatriés… La magie de l’hospitalité opère une nouvelle fois !
Dimanche 1er et lundi 2 mai. Pendant 2 jours, nous posons nos sacs et partons à la découverte de Rabat : Kasbah des Oudayas, médina, mausolée de Mohammed V, tour Hassan II, Chellah… Nous découvrons une capitale pleine de charme et de vie mais aussi une ville où la présence policière se fait sentir à chaque coin de rue et où les ambassades côtoient les villas de luxe ! Le soir, nous logeons chez Margaux, une amie d’amie qui nous accueille chez elle et nous présente ses amis, adorables. Même si nous avons hâte d’arriver à Casablanca pour commencer notre mission auprès des Missionnaires de la Charité, cela fait un bien fou de se poser et de visiter un peu !
Mardi 3 mai. Aujourd’hui, nous avons quelques dizaines de kilomètres à parcourir pour atteindre Mohammedia, où une famille française est prête à nous accueillir. Après avoir refusé les dizaines de taxis qui s’arrêtent pour nous prendre, nous y parvenons grâce à une voiture qui au départ ne nous inspirait pas confiance : 2 Marocains au regard fuyant et parlant Arabe entre eux, comme s’ils complotaient quelque chose… Nous ne sommes pas rassurés et évitons de leur dire que c’est auprès des Missionnaires de la Charité que nous nous rendons ! Mais les apparences sont trompeuses : les 2 amis font un détour pour nous déposer pile devant la gare de Mohammedia, notre destination !
Mercredi 4 mai. Nous touchons du doigt la réussite de notre défi : rejoindre Casablanca sans dépenser un sou pour les transports ou l’hébergement – sauf, bien sûr, pour le ferry de l’Espagne au Maroc ! Nos derniers conducteurs sont à la hauteur de la gentillesse et de la générosité que nous rencontrons depuis le début au Maroc : les 2 étudiants qui nous prennent à la gare de Mohammedia font un grand détour pour nous déposer pile devant la maison de la famille française qui nous hébergera pendant 1 mois à Casablanca et alors qu’ils devaient réviser leurs partiels !
C’est comblés que nous entrons chez nos futurs amis français pour un délicieux repas. Au-delà de la fierté que nous ressentons, nous sommes heureux de toutes ces merveilleuses personnes que nous avons rencontrées grâce à l’auto-stop et à notre désir de dormir chez l’habitant. Nous avons souhaité rejoindre Casablanca en stop depuis Paris pour privilégier les rencontres mais aussi pour être en cohérence avec la démarche de Mère Teresa, qui s’abandonnait toujours à la Providence : lorsqu’elle recevait de nombreux dons, elle donnait, donnait, donnait, plutôt que de garder pour le lendemain… « Demain, nous recevrons d’autres dons, j’ai confiance ! » disait-elle. A son image, nous avons essayé de nous laisser guider par le Seigneur sur la route qui nous a menés de Paris à Casablanca, du connu à l’inconnu, de la vie que nous avions jusque-là à la première mission d’un voyage qui nous changera à jamais… Et quelle route nous avons suivie ! « Regarde toutes ces rencontres, tous ces sourires, toutes ces discussions, murmure Etienne, tu imagines tout ce que nous aurions raté si, comme la plupart des gens, nous avions rejoint Casablanca en 2 heures d’avion ? ». Bon, on vous rassure, on passera quand même par les airs pour aller au Pérou mi-juin !
Mai 2016